dimanche 29 août 2010

Elle qui chevauche les tempêtes - George R.R. Martin & Lisa Tuttle


J’étais à la recherche d’un genre de livre bien particulier lorsque je suis tombée sur Elle qui chevauche les tempêtes. Je désirais refaire un plongeon exaltant dans le monde de l’héroïc fantasy sans toutefois entamer une longue saga en dix tomes, et je voulais faire ce saut avec une héroïne car j’avais entendu la critique que les femmes n’étaient pas souvent mises en avant dans cette littérature ‘machiste’ où les véritables héros portaient toujours des épées. Ce livre contrecarre totalement cette affirmation, je vous le dis tout de suite. Et elle a anéanti tous les aprioris que j’ai pu avoir contre une société ‘basiquement’ séparée entre Rampants et Aériens. Ce livre est beaucoup trop fin pour tomber dans les caricatures.

Mariss est un personnage haut en couleurs qui n’a pourtant rien de bien extraordinaire – aucun pouvoir magique, don de naissance, beauté fatale ou prophétie au-dessus de sa tête – uniquement la certitude profonde que sa place est dans les airs, comme tous les Aériens. Même peut-être davantage qu’eux, car elle vole avec un talent inné et une passion sans borne. Le vent est son amant, son ami… et pourtant elle va devoir donner les ailes à son frère Coll, qui arrive en âge de les porter, Coll qu’elle aime comme une mère, comme une sœur, Coll dont la vocation est de devenir barde et qui n’a que faire d’ailes en acier léger qu’il manie fort mal. N’étant que la fille adoptive d’une Aérien, elle va devoir les lui céder, et apprendre à vivre en Rampante, et lui en Aérien, mais pas sans s’être battue jusqu’au bout pour garder ses ailes et son droit au ciel.

Si le poids de la tradition va amener Mariss à mener sa première bataille, celle-ci sera loin d’être la dernière car en changeant le plus petit maillon d’une chaîne, on en vient à modifier profondément une société entière. Les choix qu’ont faits les auteurs de rassembler trois longues nouvelles dans un même ouvrage, et de raconter des événements majeurs dans la vie de Mariss à plusieurs années d’intervalle, permettent au lecteur de prendre un recul très intéressant, qu’on a peu l’occasion de découvrir habituellement.

Les personnages sont attachants et, oserai-je dire, très vrais. Il n’y a réellement de méchant nulle part et pourtant les obstacles se multiplient. J’ai trouvé l’intrigue palpitante : juste ce qu’il faut pour nous empêcher de lâcher le livre, même alors qu’il commence à être vraiment tard et qu’on doit se lever le lendemain. C’est un livre qu’il faudrait découvrir, rien que pour ressentir la puissance de la tempête qui vous permet de vous élancer d’une falaise sans craindre pour votre vie, ce vent qui vous élève… C’est grisant parce que l’amour de Mariss pour le vol est contagieux.

Je ne connaissais George Martin que de nom, et c’est sa belle réputation d’auteur d’héroïc fantasy qui m’a fait acheter ce livre, car Lisa Tuttle est davantage une auteure de science-fiction et que je ne raffole pas de ce genre. Pour ceux qui sont dans mon cas, il n’y a guère à s’inquiéter, ce livre est bel et bien de la fantasy et du meilleur cru. Pour les autres, j’espère que vous y trouverez votre compte dans le récit des Voyageurs stellaires qui posèrent il y a bien longtemps leur vaisseau sur cette terre morcelée en îlots, malmenée par les vents et ses mers infestées de scyllas et qui, dans l’incapacité de redécoller, forgèrent les premières ailes pour se rendre d’île en île porter des messages.

C’est un détail, mais j’ai particulièrement savouré l’importance donnée aux bardes. Ce parallèle avec le pouvoir de la presse, dans un monde dirigé par les Maîtres de terre et les Aériens, est un délice.

« Mariss chevauchait la tempête à trois mètres au-dessus de l'eau, domptant les vents de ses larges ailes en métal tissé. Elle volait, féroce, intrépide, ravie par le péril et le contact des embruns, indifférente au froid. Le ciel était d'un menaçant bleu de cobalt, les vents montaient, et elle avait des ailes ; cela lui suffisait. Si elle mourait à l'instant, elle mourrait heureuse, en vol. »

Audéarde

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire